Cette lampe vaut-elle 3 millions d’euros ?

Aujourd’hui, un de nos lecteurs nous soumet pour estimation une jolie lampe en vitrail. Une pièce dans laquelle notre commissaire-priseur reconnaît l’esprit d’une maison emblématique dans la décoration du XXème siècle.
L'art du vitrail : Tiffany
Cette lampe reposant sur une base en bronze ornée de nénuphars et à l’abat-jour composé de centaine d’éléments en verre colorés, assemblés à la manière du vitrail, rappelle le travail de la maison américaine de décoration d’intérieur, active durant le premier tiers du XXème siècle : Tiffany.
Si vous avez déjà entendu ce nom quelque part, c’est peut-être parce que vous savez que les diamants sont éternels… En effet, Tiffany est une marque américaine de bijoux et de haute joaillerie, emblématique d’un art de vivre luxueux Made in U.S.A.
Les amateurs de films noir et blanc se rappelleront de la mythique scène d’ouverture de Diamant sur Canapé ( En V.O. , Breakfast at Tiffany’s, justement) où Audrey Hepburn mange son petit déjeuner en robe couture devant les somptueuses vitrines de la maison. Les plus jeunes auront, quant à eux, peut-être vu la dernière publicité de la marque présentant le couple star Beyoncé et Jay-Z parés des trésors de Tiffany, dont un diamant jaune pesant près de 129 carats.
Derrière ce nom, se cache aussi une seconde maison, spécialisée dans l’ameublement d’intérieur, les « Studios Tiffany », créés à la fin du XIXème siècle, par Louis Comfort Tiffany, soit le fils du créateur de la marque de bijoux.
A 24 ans, et pas tant « fils à papa » que cela, Louis Comfort Tiffany décide de se reconvertir afin de ne pas marcher dans les traces de son père. Ce qui passionne Louis Comfort Tiffany, c’est le verre. Il travaille dans un premier temps dans des manufactures verrières pour finir par ouvrir son atelier. Travailleur acharné, il réfléchit aux possibilités de l’art verrier et innove dans son domaine, perfectionnant les techniques et brevetant ses inventions. C’est cependant une idée de génie qui laissera son nom à la postérité : faire entrer les vitraux dans la demeure…
Comme nous l’avons vu la semaine dernière, la société de la fin du XIXème siècle s’intéressait à l’art du Moyen-âge et vouait une grande admiration aux réalisations de cette époque, au sein desquels l’art du vitrail. Mais Tiffany et certains maîtres verriers français vont aller plus loin, en réadaptant cette technique quasiment oubliée. Ils la modernisent au goût du jour : Exit les scènes bibliques, place à la faune et la flore, très chers au style Art Nouveau. L’artiste réalise de grands décors, véritables tableaux de verres, placés dans les maisons (Au sein desquelles, la plus célèbre de toutes : La Maison Blanche…). Il a l’idée de transposer le vitrail aux petits objets : il dessine de nombreux modèles de lampes à abat-jour en verre colorés figurant des arbres et fleurs stylisées.
La question se pose alors, notre lecteur possède-t-il un trésor venu de l’autre côté de l’Atlantique ?
Pas vraiment, malheureusement. Notre lampe présente de grandes qualités décoratives et a l’originalité de présenter un beau piétement en bronze doré à décor de nénuphars, qui montre qu’il ne s’agit pas d’une copie bas de gamme. Mais elle est très loin d’égaler les créations de Tiffany. Si les plaquettes de verre nous rappellent de très loin le souvenir d’un arbre fleuri, une lampe de l’artiste est un travail digne d’un (fils d’) orfèvre : les végétaux sont figurés à la manière d’un ouvrage d’histoire naturelle, à tel point qu’on peut même identifier l’espèce.
Ainsi, notre lampe fait partie des nombreuses copies qui inondent le marché depuis les années 1970. Elle mérite une estimation coquette de 200 à 400 euros, mais est loin d’égaler les records de plusieurs millions d’euros pour les créations originales.