L'art de la tapisserie : Jean Picart Le Doux

JP. Le doux, tapisserie

Cette semaine, un de nos lecteurs soumet à notre commissaire-priseur, une tapisserie colorée. Elle est signée « Jean Picart Le Doux »  L'art de la tapisserie


L'art de la tapisserie

L’art de la tapisserie résulte d’une longue histoire qui débute à l’Antiquité : un peu partout autour du globe, les civilisations s’essayent à l’art de lice. Il s’agit de créer un motif – plus ou moins complexe- à l’aide de fils entrelacés, à l’aide d’un métier à tisser ou à la main. 

C’est cependant au Moyen-âge puis à la Renaissance, dans les Flandres d’abord, puis dans toute l’Europe que l’art de la tapisserie va connaître ses heures de gloire : art précieux par excellence, il faut parfois s’armer d’une grande patience pour pouvoir orner ses murs d’une tenture. Les commandes s’étalent parfois sur des dizaines d’années et font usage de présent diplomatiques ou d’objets de prestige, parmi les plus couteux qui soit. 

De grands cycles sont alors commandés par les souverains, pour asseoir leur puissance par l’image : la tapisserie prend alors le rôle d’un tableau de luxe, rare et cher – par le travail mais aussi par les matériaux employés : fils d’or et de soie -, et sert les élites dans leurs ambitions politiques. De l’Apocalypse d’Angers aux cycles commandés par le roi Soleil, elles assurent par l’image le prestige des souverains. 


Jean Picart Le Doux, réinvente la tapisserie

Art officiel par excellence, la lice reste au fil des siècles au même titre que la peinture, un art véritable avec ses innovations techniques et artistiques. Le déclin arrive cependant au XIXème siècle : la tapisserie n’innove plus et est décriée. Les artistes qui donnent des cartons sont en général des peintres et la tapisserie devient moins inventive, et donc moins appréciée. Quelques rares artistes font des recherches innovantes mais l’art de la tapisserie va renaitre véritablement au XXème siècle… et Jean Picart Le Doux, l’auteur du trésor de la semaine, fait partie des protagonistes de ce revival de la lice !

Si plusieurs initiatives naissent au XXème siècle, le centre emblématique de la tapisserie moderne sera Aubusson. Dans les années 1930, la ville devient le centre des principales réflexions sur la rénovation de l’art de la lice. L’idée est de créer des tapisseries qui ne sont pas de simples «  contrefaçons » de peintures. La personnalité instigatrice de ce mouvement est Jean Lurçat. Devant la tenture de l’Apocalypse, conservée à Angers, l’artiste comprend la nouvelle voie de la tapisserie moderne : dans un retour aux sources, il souhaite simplifier les cartons pour plus de lisibilité, réduire la gamme de couleurs – qui était trop étendue – à un simple accord de maximum 9 couleurs, et les décors se réinventent dans un registre proche du surréalisme… L’artiste réunit autour de lui des artistes de talent : Marc Saint Saens, Dom Robert et Jean Picart Le Doux. Un nouveau langage est né : les peintres donnent des cartons sans couleurs, assimilable à la peinture au numéro, avec des concordances de chiffres et de couleurs La tapisserie se veut aussi désormais accessible financièrement : les ateliers multiplient les éditions limitées à un nombre donné d’exemplaire.

C’est ainsi le cas de notre tapisserie. Son estimation est donc raisonnable : autour de 200 à 400 euros. Petit prix mais grand effet pour cette jolie pièce qui s’adapte dans des intérieurs contemporains ! Pour comparaison, une tapisserie de Lurçat peut se négocier plus de 10 000 euros...